Appel à communication
Première manifestation scientifique d’un projet de recherche pluriannuel ayant pour objet la circulation des récits entre l’Asie et l’Europe et leurs réécritures/réemplois, ce colloque entend questionner ce processus sous l’angle de l’imaginaire et de la mer à un niveau international (confrontations des imaginaires maritimes entre Asie et Europe). Ouvert à l’ensemble des disciplines (littérature, arts du spectacle, histoire, géographie, sociologie, économie, arts) et couvrant l’ensemble des époques, cette manifestation doit permettre de renouveler les représentations de l’espace maritime grâce aux réécritures d’une aire culturelle à l’autre : récits de voyage, œuvres mettant en scène un personnage lié au monde maritime (marins, divinités, mythologie, pirates, explorateurs, navigateurs)… Il s’agira de confronter les visions et les discours qui naissent de la reprise de ces récits : des contributions analysant par exemple la transposition en Europe d’un personnage appartenant à l’imaginaire collectif et culturel asiatique ou la réappropriation d’une œuvre appartenant au répertoire classique européen par l’Asie sont attendues. Cette thématique pourra, en outre, être analysée à travers le prisme des « cultural studies » autour des notions d’identité, d’altérité, de stéréotypie voire de malentendu. D’autres champs pourront venir compléter cette étude comme le transfert d’œuvres vers différents supports artistiques. On pourra aussi s’intéresser à la réception de ces réécritures dans leur contexte historique, politique et sociologique : polémiques, satires, conflits de mémoires…
De manière plus globale, ce colloque doit inaugurer un cycle de recherche invitant les chercheurs à s’interroger sur ces phénomènes de reprises, de variations, d’interprétations, de manipulations voire de subversions de récits oraux ou écrits, collectifs ou individuels, selon une approche transculturelle. Autant les réécritures au sein d’une même sphère culturelle ont pu donner lieu à des études autour des questions d’intertextualité, de pastiche, de parodie, de détournement, autant ces mêmes réécritures ont-elles été peu investies selon le prisme de l’interculturel. Or, c’est de cela qu’il s’agit : comment un récit né dans l’imaginaire d’un ou d’une artiste en Europe donne-t-il lieu à une réécriture à l’autre bout du monde, au Japon, en Chine, en Corée, en Inde, au Vietnam et à quelles fins ? De même, comment un modèle né en Asie nourrit-il l’inspiration en Europe d’une nouvelle œuvre dont le support n’a de limite que l’imagination et les moyens technologiques ? Quels sont les effets et les apports de ce passage d’une sphère culturelle dans une autre ? Dans quelle mesure ces transferts culturels éclairent-ils les normes de la représentation aussi bien du lieu d’origine que du lieu de la réécriture de l’œuvre ?
Le champ de recherche dépasse donc la seule littérature et même la seule littérature comparée pour intégrer l’ensemble des sciences humaines car la notion de récit doit être entendue au sens large : fait divers, événement historique, mouvement social, storytelling… mais aussi image, représentation, rêve, fantasme, … De même la réécriture ne s’arrête pas à la seule pratique de l’écrivain, elle touche aussi les arts de la scène, du spectacle. Les œuvres cinématographiques ou picturales entrent également dans le cadre de ce programme de recherche. Un paysage ou un portrait, par son cadrage, par l’objet représenté, par le point de vue, par le choix du support et des matériaux, développe aussi un récit. Il s’agira de mesurer l’écart entre le point de départ originel, matériel ou immatériel, et l’œuvre finale pour mettre au jour les enjeux idéologiques, esthétiques, sociopolitiques, pédagogiques, ludiques et identitaires de cette appropriation créative dans un contexte autre. Aussi l’étude de ces appropriations créatives est-elle à la fois transculturelle et diachronique.
Le parcours sera dans les deux sens : de l’Europe vers l’Asie comme de l’Asie vers l’Europe, en ne privilégiant pas une sphère culturelle aux dépens d’une autre. L’innutrition des imaginaires par la circulation des récits, la diversité des champs et des formes des réemplois, la production artistique – littéraire, iconographique, musicale, cinématographique… - qui résulte de ces appropriations créatives transculturelles seront au cœur de ce programme de recherche.
La première manifestation de ce programme de recherche, le colloque international, aura lieu du 6 au 8 octobre 2017 au Havre. Le thème, « Imaginaires maritimes », est articulé aux 500 ans de la fondation de la Ville du Havre. Cette manifestation inclura l’événement pyrotechnique, conçu par l’artiste chinois Cai Guo Qiang, qui est une réécriture du tableau de Monet : « Impressions soleil levant ». Ce feu d’artifice, tiré, en principe, le 8 octobre, sera précédé d’une conférence assurée par l’un des intervenants du colloque.
Deux autres manifestations, sous forme de journées d’étude, sont prévues dans ce programme de recherche.
L’une étudiera les enjeux du réemploi et de la réécriture des figures mythiques féminines d’une sphère culturelle dans une autre. Jeanne d’Arc ou Carmen, pour le versant européen, Ma-Zu ou Ching Shi, pour le versant asiatique, forment autant d’exemples de figures féminines qui ont nourri un imaginaire de part et d’autre du monde et généré des réappropriations créatives. Cette liste, donnée à titre indicatif pour expliciter le domaine de la recherche, montre la dimension heuristique de ce projet.
L’autre interrogera les relations entre classiques et réécritures : si la réécriture au sein d’une même sphère culturelle semble signer le statut de classique, qu’en est-il dans le cadre de ce dialogue interculturel ? Un classique est-il un universel ?
Les propositions de communication (notice biobibliographique, résumé 3500 signes) sont à adresser jusqu’au 28 février 2017 à Véronique Bui :
veronique.bui@univ-lehavre.fr
Comité scientifique
Lo Shih-Lung, Université Montpellier III
Kaoru Hakata, Université des Langues étrangères, Tokyo
Ivan Ruviditch, Université Normale de Shanghai
Emmanuel Lincot, Institut catholique de Paris
Yang Zhen, Université de Fudan (Shanghai)
Kan Chia-Ping, Université Centrale de Taiwan (Taiwan)
Laura Colombo, Université de Vérone (Italie)
Arnaud Le Marchand, Université du Havre